La question porte ici sur les conditions réelles de la communication sociale et politique. Dans linterdit du contact direct entre les personnes sengendre une semiosis sociale. Elle est tissée par des régulateurs artificiels qui, tels le signe monétaire et le règlement juridique, médiatisent la reconnaissance réciproque. Cest le système. Il a remplacé, pense-t-on, la violence naturelle par une autre, car sa rationalité dure détruirait la raison molle du monde vécu dont il est pourtant issu, faisant peser une menace sur lidentité et la citoyenneté. Comment la communication peut-elle alors reconquérir sa propre essence réifiée dans lorganisation ? Comment les individus font-ils face, dans nos sociétés, à lautonomisation des ordres différenciés, cette complexité horizontale qui définit pour le monde des personnes les ordres de la reconnaissance, où se joue notre responsabilité ?
Or, en catalysant les demandes dune responsabilité étendue aux temps jusquici abandonnés à une gestion non critique des mémoires nationales, la construction de lEurope politique invite à une réflexion fondamentale sur les relations quentretiennent les individus et les peuples. Entre un culturalisme pédant qui relègue les hommes au musée et un universalisme arrogant qui méprise les contextes culturels, il y a place pour considérer la situation quoccupe chaque peuple dans une histoire de la reconnaissance. Cest cette situation morale qui doit être philosophiquement comprise et identifiée, afin déclairer le sens politique des relations prises entre les nations.